Balade
sur un sentier à suivre guida mes pas vers une direction qui se
dessinait d’elle-même. Marque-page du marcheur sur un tapis de
laine sous zéro, l’air pur de sa fraîcheur nourrissait l’âme
seule que je suis. Union communicative avec l’essence qui me
nourrit, je divaguais sur un fond de n’importe quoi. Silence entre
deux silences, la nature se laissait conquérir par le respect que je
lui portais. Bien-être se coiffant de l’innocence du temps à
perdre ou à prendre, c’est selon. Dans le sursis d’un vol de
mésange esseulée cherchant pitance sur un nid de verdure hivernant,
une distraction m’appelait à confondre ma réalité avec celle qui
joue d’abondance dans ma tête. Tourbillon en permanence sous
l’appellation d’une quête de sens, je m’amusais de tout et de
rien. Réflexions en bulle de savon m’éclatant en plein visage sur
un ciel déclinant la fin de sa phase diurne. Urgence d’un retour
parmi mille autres, j’entrepris ma marche arrière vers une
destination bétonnée sans le vert si cher au poète que je suis.
Marchant
entre deux soupirs de restrictions, je me confonds à l’image de
moi-même. Pourtant, en d’autres mots, constat s’harmonisant avec
une vision en déboire d’une rencontre factice. Trêve en rupture
d’abondance, je vois à l’horizon de ses hauteurs, en contre-bas,
la déchéance. Ce vide dans le regard de ceux qui regardent au loin.
Bruits
en fond de silence rompu, la civilisation se dressa en forme
arpentant le ciel à conquérir, je me grattais ciel d’un édifice
à croiser. Mes pas jadis isolés sur un feutre immaculé se voyaient
perdus dans une masse de passants qui défilaient sans aiguille à
chatouiller. Détails en similitude en tout point pendant sur les
oreilles des isolés, filages en blanc dans les cavités auditives
encapuchonnées dans l’univers de leur propre monde. Leurs regards
brillaient par leur absence. Mais où sont donc les éclairs d’antan?
Est-ce que la vie s’est étiolée ou esquivée face à cette toile
qui englue tous ceux qui y posent leur vie. Aspirant leur étincelle
au profit de leur âme pourtant encore vierge d’usures. Le tout
accompagné par une foulée à peine surélevée grinçant le pavé
de leur perte de volonté.
Résignation
dans la volonté de ne pas croire en demain, mais où sont nos rêves?
Puis,
dans un élan de vouloir bien comprendre, j’ai vu. Abondance en
surabondance, de réponses à découvrir voguant sur une vague de
paresse. Tous ceux qui veulent désormais savoir ne se livrent plus à
la quête et réflexion dans l’interne de leur jugement. Lâcheté
du cerveau vers un lien de consommation rapide, la toile offre cette
facilité qui réduit à nulle la réflexion, jadis mère du savoir,
maintenant orpheline. Déduction et quête d’une logique sont les
archaïsmes en paradoxe d’une banalisation. Fruit dans la
cogitation est épuisant pour une nourriture qui se bonifie avec le
temps et l’effort appliqué.
Mais
où sont donc nos rêves, en dérive d’un surf en mal vivre?
Désinvolte
dans la suite des idées, fléau double en voie de survenir,
créativité et imaginaire s’abandonnent eux aussi à la flemme de
ce qui survient. Stimulation dans le précoce de l’âge prénatal,
l’embryon apprend déjà à ne pas s’occuper seul. Charlatans en
proie au mercantile, vendent à tous l’idée d’une brillance
cérébrale plus vraie que nature en échange de pécule pour babiole
placebo. Dès la lumière sur leur peau encore blanche, le marché
s’élabore davantage. Très tôt, on inculque que le consommé est
meilleur que le soi-même bâti. Créative en perte de vitesse, on
bricole à coup de plans préétablis, de marchandise à l’effigie
de ce qui rapporte le plus. Produits associés s’associent à
l’image à valoriser brimant la culture d’une conscience de son
unicité.
Mais
où sont donc nos rêves?
Désormais,
pleurant une vision qui n’était plus mienne, je fonçai alors vers
une décharge de bon sens. Enlisé dans un sable d’engrenage, je
perdis pied et me retrouva dans le vide du consommé. Abrillant le
froid de mon intérieur, je grelottais face à ce fléau qu’est le
monde actuel. Froid, austère, tapissé de marchandise à jeter après
usage, solitaire dans une foule sans visage.
Mais
où est mon rêve?
Bruissement
d’ailes sur un nuage de courage, je me relevai d’amertume.
Lumière en chrysalide aux confins de mes croyances, je tremblai
d’existence à vouloir encore y croire. Tomber sous un piège du
pécule avarié, j’ai failli. Démence en outrage de tribunal, je
me concluais à vivre à partir de mes propres racines plutôt que
celles proposées aux marchés. Mes pas seront les miens et des
empruntés, bref je serai ma propre voix désormais. Et qui sait, un
jour peut-être je pourrai encore rêver d’être un rêveur.
Suis-je
encore dans un rêve?