TISIPHONE
OU LA VENGEANCE
Chapitre
1
Un
jour nouveau. Un jour de plus. Mais qu’est-ce qu’une simple journée ? Ou
un mois ? Une année ? Un siècle ? Et même un millénaire ?
Je
suis là depuis si longtemps que je ne compte plus. D’ailleurs, je ne sais pas quand
tout cela a débuté. Suis-je née un jour ? Pour moi, l’éternité s’étale
aussi bien vers le passé que vers l’avenir. On m’a donné tant de noms qu’aucun
ne me correspond plus. Je me souviens pourtant de jours plus heureux où
l’on était fier de me montrer à tous. D’instants de liesse où je paradais en
tête des cortèges royaux. D’alcôves intimes et chaleureuses où l’on m’admirait
et jalousait ma beauté. De fêtes flamboyantes où les plus grands seigneurs se
vantaient de me posséder, moi qui ne fus jamais à personne. D’instants de grâce
où l’on me couchait sur les plus belles tentures pour me vénérer telle une
déesse vivante. Heureux étaient ces moments durant lesquels il m’était donné de
côtoyer le monde extérieur et toutes ses richesses.
Mais,
depuis longtemps, je n’ai plus vu la lumière du soleil. Existe-t-il encore cet
astre qui exaltait mon éclat ? Aujourd’hui, je me contenterais d’un seul
rayon de lune. Un seul suffirait à réchauffer mes veines glacées par des
lustres de solitude et d’enfermement dans ce sous-monde noir et obscur. Ici,
rien ne bouge, rien ne vit, rien ne luit. Seules, mes pensées occupent mon
univers.
Depuis
si longtemps, je n’ai plus entendu le souffle du vent dans les branches des
sapins. Il y a tellement de temps que je n’ai plus senti l’odeur du feu de bois
dans la cheminée ou le parfum des roses du jardin. Tant d’années… de
siècles ? que je ne m’en souviens qu’à peine. Il me semble que seul
subsiste mon esprit. Ai-je encore une matérialité dans cette gangue de
pierre ? Dans cette froideur et cette noirceur, suis-je encore quelque
chose ? Aucune sensation ne vient interrompre mes réflexions nocturnes.
Mes idées fusent parfois sans que je puisse les retenir. Elles passent alors
dans une fulgurance si violente qu’elles auraient dû détruire mon corps… si
j’en avais un. A d’autres moments, elles ralentissent tant qu’elles en
deviennent de cruelles obsessions. Une torture si lancinante s’empare de tout
mon être qu’elle déchirerait mon cœur… si j’en avais un. Cela veut il dire que
je ne suis plus rien ? Si tel est le cas, pourquoi et comment ces
questions me viennent-elles ?
Je
ne sais pas ni où ni quand je suis née. Je ne sais pas ni quand ni où je suis
aujourd’hui. Et je ne sais plus si je suis encore quelque chose.
Merci pour cette perspective de la ronde du temps... et des vies... de nos vies successives ... Peut etre... Ronde qui nous rappelle nos vascillements entre nos parts de lumière et d'ombre... La toupie tourne bien vite en ce moment et peut etre que la suite de tes circonlocutions sur l'immensité blanche de tes prochaines pages nous permettra de trouver un ilot de paix en attendant la prochaine épreuve ? Bises et merci ! Francis
RépondreSupprimerMerci Francis de ce gentil commentaire. Le prochain chapitre sera... surprenant. Tu risques même de te dire que ce n'est pas la même histoire. Mais si. :-) Par contre, il s'agit d'une nouvelle fantastique noire... la paix et la compréhension n'arriveront qu'en toute fin... peut-être. :-)
RépondreSupprimer